Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

L'actualité de Philippine

8 juin 2011

Jean-Marie Cavada, le remaniement, le centre, et la majorité présidentielle

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/politique/jean-marie-cavada-remaniement-centre-et-majorité-présidentielle20101130.html?sms_ss=facebook&at_xt=4cf67e57db540c82%2C0

Entretien. Quel avenir pour le centre dans la majorité ?

Avec les libéraux, les centristes sont les grands laissés pour compte du remaniement. Quel est leur avenir dans la majorité présidentielle ? Explications de Jean-Marie Cavada, vice-président et porte-parole du Nouveau Centre, et député européen, pour "Valeurs Actuelles".

Le gouvernement Fillon III remet-il en cause l’équilibre de la majorité présidentielle et des différentes sensibilités au sein de l’UMP ? C’est un gouvernement qui s’est contracté essentiellement autour d’un certain nombre de personnalités de l’UMP classique. Ce qui me frappe, c’est que la démarche est à l’inverse de ce que l’on observe en Allemagne ou en Grande-Bretagne par pareil temps de crise. En Allemagne, il y a un gouvernement de coalition avec la CDU et FSU d’une part, et les centristes qui s’appellent le FDP d’autre part. En Grande-Bretagne, David Cameron a fait la même chose avec le centriste Nick Clegg. En France, il y a un repli, une sorte de contraction. C’est donc une base beaucoup plus étroite de travail pour répondre aux difficultés de la crise. On a rétréci la base d’action politique gouvernementale, même si les tenants du marketing ont de bons sentiments et vous diront qu’il y a deux ou trois personnalités qui sont issues du centre. Mais pour autant elles ne sont pas du centre structuré, c’est-à-dire le Nouveau Centre – qui a à la fois des militants, des élus, et une doctrine.

Je ne sais pas si cela remet en cause l’UMP en tant que telle, mais en tous les cas, la feuille de température montre qu’il y a une bonne bronchite dans ce parti ! Un certain nombre de personnes issues du centre qui sont maintenant à l’UMP, comme Monsieur Raffarin et d’autres, ne se sentent pas à l’aise à l’UMP et elles le font savoir en ce moment à travers différentes déclarations dans la presse. D’une certaine manière, on peut dire que l’idée qui avait présidé à la création de l’UMP ne fonctionne pas bien en ce moment.

Jean-Louis Borloo a déclaré après son éviction du gouvernement qu’il inscrivait son action dans le cadre de la majorité présidentielle. Est-ce aussi le cas d’Hervé Morin ? Les objectifs ne sont pas basés sur le même calendrier. Nous pensons que pour une alliance présidentielle – une alliance électorale puis une coalition si victoire il y a – il faudra traiter de deux entités différentes : il y a le parti majoritaire qui est l’UMP, et le parti numéro 2, le Nouveau Centre. Ce dernier a besoin d’être autonome, indépendant, c’est-à-dire de parler à ses militants, de parler à l’opinion pour lui expliquer sa doctrine et son projet. On arrivera à la présidentielle avec deux projets qui seront distincts mais qui auront des points communs. Dans ces conditions, il faut qu’il y ait une coalition qui peut être avant le 1er tour, mais qui peut également être entre les deux tours. Il y a plusieurs scénarios possibles : Mitterrand avait fait l’union avant les élections. La gauche plurielle défendait les candidatures multiples. Tout est possible, mais telles que les choses sont actuellement perceptibles, Hervé Morin souhaite aller jusqu’à la présidentielle pour présenter son programme. 

Propos recueillis par Philippine de Maigret

Publicité
8 juin 2011

Remaniement : stratégies et risques

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/politique/remaniement-stratégies-et-risques20101117.html?sms_ss=facebook&at_xt=4ce3d2f2c3223f83%2C0

Politique. Le gouvernement Fillon III, l'opinion et la prochaine présidentielle...

Attendu depuis des mois, le remaniement ministériel a accouché d’un gouvernement Fillon III qui privilégie la continuité, avec une équipe resserrée. La stratégie choisie est-elle la meilleure pour préparer 2012 ? N’a-t-elle pas, au contraire, contribué à faire émerger de potentiels candidats centristes à la prochaine élection présidentielle ? Pascal Perrineau, directeur du Cevipof, décrypte pour "Valeurs Actuelles" ce remaniement et ses répercussions politiques.

Est-ce que l’histoire politique montre qu’on peut regagner l’opinion avec un remaniement, ou est-ce peine perdue ? Un remaniement ne suffit pas à reconquérir l’opinion publique, en revanche il peut y contribuer, surtout après une année – commencée à l’automne 2009 – marquée par de nombreux dysfonctionnements au sein du gouvernement, et dans l’opinion publique par une série de difficultés. La cohésion gouvernementale a également été mise à mal par plusieurs déclarations où – à tort ou à raison – les Français pouvaient se poser des questions sur l’homogénéité du gouvernement.

Si celui-ci se remet en ordre de bataille, est davantage rassemblé, davantage homogène, cela ne peut que le servir dans la reconquête de l’opinion. En particulier avec un François Fillon qui continue à avoir – toutes les enquêtes le montrent –, plus de trois ans après son arrivée au pouvoir, et en dépit de la crise économique et sociale, une popularité relativement forte dans l’opinion publique. Elle l’est d’autant plus dans le cœur de cible de l’électorat de la majorité : des électeurs qui se sentent proches de l’UMP, et dont certains, on l’a vu aux régionales, peuvent hésiter ou se réfugier dans l’abstention. Auprès de ces segments électoraux, un nouveau gouvernement, davantage rassemblé, peut contribuer à reconquérir l’opinion. Mais il faudra juger ce gouvernement aux mesures qui vont être prises, aux réformes qui vont être engagées, en particulier sur le terrain fiscal, sur le terrain de la dépendance des personnes âgées. C’est ce qui pourra, le moment venu, contribuer à redorer le blason de l’action de la majorité.

Est-ce que ce remaniementvous paraît susceptible d’aider Nicolas Sarkozy à rebondir ? Il y a, pour l’instant, un sentiment partagé. Dans quelques enquêtes qui ont été faites juste avant le renouvellement du gouvernement, il y avait une attente vis-à-vis de ce remaniement, une attente vis-à-vis de François Fillon qui reste très populaire dans l’électorat de la majorité. Mais, à contrario, le fait de reconduire le même homme a privé Nicolas Sarkozy d’un effet de surprise. Et la quadrature du cercle n’est pas simple ! Comment redonner un second souffle en gardant le même capitaine à la tête du gouvernement ? Alors il faudra pour cela écouter très attentivement, à la fois, ce que nous dira la feuille de route telle qu’elle sera fixée par le Président de la République, et telle qu’elle sera ensuite déclinée dans la feuille de politique générale le 24 novembre par François Fillon. Le dispositif gouvernemental a été modifié, resserré et clarifié. Les équilibres politiques ont changés. On a certainement perdu en diversité, on a gagné peut-être en homogénéité, mais il faut attendre maintenant les axes de ce gouvernement. Il y a, là, une attente de l’opinion. Pour l’instant, ce n’est que la moitié du chemin qui a été faite.

Existe-t-il pour l’UMP le risque de concurrence au centre en 2012 ? Qui pourrait l’incarner ? Sous la Ve République, lors de l’élection présidentielle, il y a toujours eu une diversité d’expression électorale des droites et du centre. En 1965, il y avait, certes, le général de Gaulle, mais il y avait aussi Jean Lecanuet. En 1969, il y avait Georges Pompidou et Alain Poher. En 1974, il y avait Jacques Chaban-Delmas et Valery Giscard d’Estaing, ensuite Jacques Chirac et Valery Giscard d’Estaing en 1981, puis Raymond Barre et Jacques Chirac, et ainsi de suite. Ce qui a changé la donne, c’est la création de l’UMP en 2002, qui était censée être le pôle d’unification de toutes ces familles dans un seul et même parti. Cependant, on voit bien que cette ambition de l’UMP n’a été que partiellement réalisée. Certes il y a des centristes dans l’UMP, mais il y a aussi des centristes qui sont restés en dehors de l’UMP. René Rémond l’avait dit : il y a des droites, il y a des traditions différentes dans la droite et le centre. C’est ce pluralisme qui s’exprime aujourd’hui.

Cet électorat centriste représente au mieux en ce moment 18 à 19 % des votes, c’était le score de François Bayrou à la dernière élection présidentielle ; au pire, il représente 5 à 7 %. Dans cet espace, il n’y a aucun homme qui semble capable de le fédérer. C’est pour cela que l’on parle de bataille, de guerre des centres. Pour cet espace centriste, relativement délimité, le problème c’est qu’il y a trop d’hommes qui prétendent à le représenter : Hervé Morin, Jean-Louis Borloo, François Bayrou et éventuellement d’autres. Le travail politique que tente aujourd’hui Jean-Louis Borloo est de voir s’il y a un homme, et peut-être lui, qui pourrait être au centre de gravité de cet espace et avoir plus de légitimité de représenter cette famille au sens large. Car à la famille du centre il faut ajouter la famille des électeurs écologistes, qui ne se retrouvent pas tous forcément dans un écologisme qui a lié à son destin à la gauche. C’est ce qui donne certainement une ambition à Jean-Louis Borloo qui a, à la fois, une image de centre (patron du parti radical), mais qui a également une action, en tant que ministre de l’Environnement, sur le terrain de l’écologie.

Alors est-ce que cela sert ou dessert la majorité ? On peut avoir la lecture qui consiste à dire que Nicolas Sarkozy reste dans l’espace des droites et du centre, celui qui a – on le voit dans toutes les enquêtes d’intentions de vote – la position la plus dominante. Mais celle-ci n’est pas exclusive d’une autre candidature qui pourrait exprimer la diversité des droites et du centre, comme ça a toujours été le cas lors d’élections présidentielles. A ce moment-là, un candidat sur son flan central a certainement vocation à attirer des électeurs qui spontanément ne viendraient pas vers Nicolas Sarkozy pour le premier tour. Mais cette candidature pourrait agréger une série d’électeurs qui, dans la perspective d’un second tour, pourrait accroître le capital électoral d’un Nicolas Sarkozy arrivé en tête du premier tour.

Ce scénario n’est pas absurde, à la condition qu’on n’ait pas affaire à un centre complètement éclaté dans de multiples candidatures, se perdant dans des querelles interminables d’egos. J’ai été frappé par le fait que, contrairement à d’autres ministres, je pense en particulier à  Fadela Amara ou à Hervé Morin, Jean-Louis Borloo a bien précisé, le jour-même où il quittait son ministère, qu’il inscrivait son action dans le cadre de la majorité présidentielle… Il ne faut pas l’oublier ! 

Propos recueillis par Philippine de Maigret

8 juin 2011

Olivier Vial : « Les lycéens sont instrumentalisés dans un combat qui n’est pas le leur »

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/politique/olivier-vial-«-lycéens-sont-instrumentalisés-un-combat-qui-n’est-pas-leur-»2010?sms_ss=facebook&at_xt=4cbc3d30ca587d82%2C0

Retraites. Le délégué général de l'Uni juge les manifestations de lycéens.

Depuis une semaine, les lycéens ont fait leur entrée dans le cortège des manifestations. Comme ce fut le cas dans le passé – pour la loi Devaquet ou plus récemment le CPE –, leur mobilisation peut-elle être contribuer faire capoter la réforme ? Et en manifestant sur le thème des retraites, défendent-ils leurs intérêts bien compris, ou sont-ils victimes d’une instrumentalisation ? "Valeurs Actuelles" a interrogé Olivier Vial, délégué général de l’Uni.

Quel regard, et quel jugement, portez-vous sur l'entrée des lycéens dans les manifestations contre la réforme des retraites ?Depuis mercredi 13 octobre 2010, nous avons réellement une opération orchestrée par l’extrême gauche, qui consiste à faire sortir les lycéens dans la rue pour servir de renfort à des mobilisations de salariés qui n’étaient pas arrivées à infléchir la volonté du gouvernement. L’objectif est à la fois de faire du nombre, mais aussi et surtout, de peser plus fortement sur le mouvement par une radicalisation. Nous avons eu des exemples très précis. Vendredi 15 octobre, dans le Gard, des membres du parti communiste sont allés chercher les lycéens. A Nanterre, jeudi 14 octobre, des partisans du NPA ont envoyés des lycéens en mission commando, presque en mission suicide, attaquer l’université de Nanterre, jusqu’à sa sécurité. Bilan : des blessés du côté des agents de sécurité de Nanterre. Ces missions, orchestrées par l’extrême gauche, sont plus que médiatiques. Aujourd’hui le but est de radicaliser le mouvement en mettant, de manière peu courageuse, des jeunes en première ligne.

En quoi l’entrée des jeunes dans les manifestations est-elle importante ? Si les syndicats de salariés “classiques”, et même une partie de la gauche, jouent leur baroud d’honneur, ils savent que cette réforme est nécessaire. Le gouvernement ne peut plus reculer. Mais l’extrême gauche, elle, a décidé de jouer son va-tout. Nous avons vraiment l’impression qu’elle tente de provoquer les forces de l’ordre pour essayer d’obtenir un incident. Olivier Besancenot a appelé, jeudi 14 octobre, à un nouveau mai 68. En réalité, il ne s’agit aucunement d’un mai 68 bis, mais bien plutôt de rejouer un certain décembre 1986. La mort de Malik Oussekine avait alors arrêté nette la réforme de l’université. Nous avons l’impression que les partis d’extrême gauche se disent qu’un martyr serait certainement une des solutions pour, éventuellement, faire reculer le gouvernement, tout du moins, noircir l’image du gouvernement. Tous les ingrédients sont réunis pour arriver à cela depuis mercredi 14 octobre.

Nous assistons à des actions ultra violentes. Vendredi 15 octobre, des lycéens encadrés par des militants d’extrême gauche ont essayé de prendre d’assaut le château de Versailles : cela n’a plus rien avoir avec des revendications sur les retraites ! A Nîmes, cinq voitures ont été brûlées, des policiers ont été blessés par des projectiles et des cailloux. Les lycéens se battent contre des policiers. A chaque fois, on retrouve derrière ces lycéens des militants d’extrême gauche. Ces derniers instrumentalisent des jeunes en espérant aboutir à un drame humain.

Les mobilisations chez les lycéens sont beaucoup plus anarchiques, beaucoup plus violentes, et bien plus radicales. Il s’agit d’un risque réel. Un accident – suite à une attaque des lycéens et une répression des policiers – pourrait affaiblir concrètement le gouvernement, voire même le mettre à terre, comme ce qui s’était passé lors de la réforme Devaquet.

Quel message voulez-vous donner aux lycéens qui manifestent ? Leur retraite, ils la prendront dans cinquante ans ! D’ici-là, il y aura d’autres réformes des retraites. On ne sait pas du tout ce que sera la France dans cinquante ans. C’est donc assez étonnant d’avoir des lycéens qui se mobilisent pour quelque chose de très, très virtuel pour eux !

En réalité, le combat que mènent les lycéens, aujourd’hui, est un combat qui n’est pas le leur. C’est un peu la fable de la cigale et de la fourmi, mais inversée. D’un côté, nous avons une génération de soixante-huitards qui a vécu à crédit pendant des décennies, et qui laisse à la France ainsi qu’aux générations suivantes – et notamment à la génération des lycéens – une ardoise conséquente, avec des dettes, avec des retraites non financées. Et de l’autre, des lycéens, qui continuent de laisser à leurs aînés la possibilité de vivre à crédit, alors qu’il faut absolument que l’on travaille plus. Il est important que cette génération-là travaille jusqu’à 62 ans. Ce n’est pas une honte de travailler plus et de payer une partie de la dette qu’elle laisse à la génération suivante. En manifestant, les lycéens se tirent une balle dans le pied. 

Propos recueillis par Philippine de Maigret

8 juin 2011

Santé : le droit à l'objection de conscience réaffirmé

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/société/santé-droit-à-l039objection-de-conscience-réaffirmée20101013.html?sms_ss=facebook&at_xt=4cb57d41a8cb286a%2C0

Bioéthique. Une décision importante du Conseil de l'Europe.

Jeudi 7 octobre 2010, le Conseil de l’Europe était amené à se pencher sur la question de l’objection de conscience pour les professions de santé. A l’initiative d’un groupe de parlementaires socialistes emmené par la député britannique Christine McCafferty, le Conseil était en effet amené à voter un projet de résolution et de recommandation intitulé « Accès des femmes à des soins médicaux légaux : problème du recours non réglementé à l’objection de conscience ». L’objectif : limiter l’objection de conscience des soignants, c’est-à-dire le fait que des médecins ou des infirmières puissent refuser de participer, par exemple, à un avortement ou à l’euthanasie, dans les pays où sa pratique est légale. Mais au contraire des attentes des auteurs de cette initiative, la résolution du Conseil de l’Europe réaffirme au contraire le droit à l’objection de conscience. Délégué général de l’Alliance pour les Droits de la Vie, Tugdual Derville revient pour "Valeurs Actuelles" sur les enjeux de cette décision européenne.
 

Quel était l'enjeu de cette délibération ? Trois dispositions principales nous semblaient très dangereuses pour l’objection de conscience, qui est le droit de ne pas pratiquer des actes contraires à sa conscience. En premier lieu : la résolution voulait supprimer le droit à l’objection de conscience « en cas d’urgence ». Or, la notion d’urgence est très sensible : c’est justement dans ces moments d’urgence qu’il faut davantage prendre le temps réfléchir “en conscience” ; on se fait rapidement déborder par l’état d’urgence...
 

Deuxièmement, il était proposé d’exclure de l’objection de conscience les soignants qui participent “indirectement” à l’acte. A l’Alliance, nous mesurons ce que l’émiettement de la responsabilité d’un acte entre différents intervenants peut entraîner : des résultats catastrophiques et injustes, sans que personne ne s’en sente vraiment responsable, puisque chacun a apporté une toute petite pierre. C’est le grand risque de la dissolution de la conscience dont l’Histoire a montré des exemples terrifiants. Enfin, la dernière disposition était d’établir des listes officielles d’objecteurs, c'est-à-dire des listes de soignants qui font valoir leur clause de conscience. L’établissement de telles listes est très dangereux : c’est une porte ouverte à la discrimination à l’embauche ou à des brimades professionnelles. Nous constatons déjà que la pression contre l’objection est forte au sein de certains services médicaux.
 
Quelle est la portée de la résolution finalement adoptée ? Les parlementaires ont déposé 90 amendements, qui ont complètement modifié le texte d’origine, jusqu’à son titre. Le droit plein et entier à l’objection de conscience est finalement réaffirmé. Assez solennellement, le texte dit aujourd’hui : « Nul établissement ou personne ne peut faire l’objet de pressions, être tenu pour responsable ou subir des discriminations pour son refus de réaliser, d’accueillir ou d’assister un avortement, une fausse couche provoquée ou une euthanasie, ou de s’y soumettre, ni pour son refus d’accomplir toute intervention visant à provoquer la mort du fœtus ou d’un embryon humain, quelles qu’en soient les raisons. » Nous avons donc assisté au Conseil de l’Europe à véritableretournement en faveur du droit à l’objection de conscience et une déroute pour ceux qui entendaient le limiter.
 
Cette résolution règle-t-elle tous les problèmes ?
 Nous avons constaté que l’exercice de la clause de conscience est très difficile pour les soignants, alors même qu’elle est reconnue par la loi. Le Conseil de l’Europe a permis de délier les langues. L’Appel « Sauvons l’objection de conscience » que nous avons lancé sur Internet a recueilli 26 000 signatures en moins d’une semaine, dont celle de plus de 4 500 soignants : les témoignages reçus nous ont confirmés dans cette inquiétude. Des soignants nous ont confié avoir été bridés dans leur carrière ; d’autres nous ont rapporté que leur chef de service affirmait qu’il n’embaucherait plus un candidat qui ferait valoir sa clause deconscience, sous prétexte que cela “complique la vie du service”. D’autres encore se sont sentis forcés d’accomplir des actes qu’ils ne voulaient pas accomplir... Même pour le refus de commettre des actes illégaux comme l’euthanasie, des soignants nous ont expliqué avoir été punis !

Pour nous, l’urgence est donc de rendre moins théorique la clause de conscience des soignants. Nous voulons aussi aider certaines professions à obtenir l’application de la clause de conscience alors qu’elles n’y ont pas droit pour l’instant. C’est le cas des pharmaciens, confrontés à la diffusion de produits abortifs. 
 
Ce débat est finalement emblématique d’une sorte de bras de fer : face à ceux qui tentent de faire “rentrer dans le rang” les professions de santé en étouffant leur liberté de conscience, nous prônons le maintien et même l’élargissement de la clause de conscience. Notre président, le docteur Xavier Mirabel, conteste notamment l’idée que le soignant devrait être une sorte de prestataire de service public répondant aux injonctions de l’Etat ou même de ses patients. Car la mission du soignant est d’être au service de la santé des personnes, pas de toutes leurs demandes.

Nous constatons ici un clivage majeur entre deux conceptions de la médecine. La première prive les médecins de leur liberté en les soumettant soit à l’Etat (vision “administrée”) soit à des clients (vision libérale). La seconde reconnaît que les professionnels de santé ont une mission propre, qu’ils gardent la responsabilité de discerner ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. Mais la question de l’objection de conscience est finalement renvoyée à chaque citoyen (fonctionnaire, enseignant, journaliste etc.), et nous devrions tous reconnaître que, dans une société humaine, la liberté de conscience ne souffre aucune exception. 

Propos recueillis par Philippine de Maigret

8 juin 2011

Allemagne : Thilo Sarrazin démissionne, mais le débat sur l’immigration est lancé

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/monde/allemagne-thilo-sarrazin-démissionne-mais-débat-l’immigration-est-lancé20100910.htm?sms_ss=facebook

Immigration. La polémique autour du livre "L'Allemagne court à sa perte".

Le tollé suscité par les thèses polémiques de son livre "l’Allemagne court à sa perte" a obligé ce membre du conseil d’administration de la Bundesbank à se démettre de ses fonctions. Mais son pamphlet, qui a rencontré un vaste écho auprès de l’opinion, n’en a pas moins obligé l’Allemagne à ouvrir un débat sur l’immigration qu’elle avait jusqu’alors toujours refoulé.

Après avoir longtemps refusé de quitter son poste, Thilo Sarrazin a finalement annoncé, vendredi 10 septembre, qu’il demanderait à être déchargé de ses fonctions. Vivant désormais sous protection policière à la suite de menaces, il a expliqué sa démission en jugeant « qu'il était risqué, dans l'atmosphère actuelle, de m'opposer à l'établissement politique et médiatique tout entier », et l’a présentée, loin d’être un mea culpa, comme une simple « rétractation stratégique » qui lui permettra de « travailler sur les sujets qui [lui] importent réellement ».

Tout avait commencé avec la publication de son pamphlet l’Allemagne court à sa perte, le 30 août dernier. Cet ancien ministre des finances de Berlin, membre du conseil d’administration de la Bundesbank mais aussi du parti social-démocrate, le SPD, se penchait dans son livre événement sur le problème de l’intégration des musulmans en Allemagne.

Thilo Sarrazin, qui n’en est pas à sa première polémique, a voulu sonner le tocsin : « Je ne veux pas que mes petits-enfants et arrière-petits-enfants vivent dans un pays à majorité musulmane où le turc et l’arabe seraient largement répandus, où les femmes porteraient des foulards de tête, où les journées seraient rythmées par l’appel du muezzin. » « Si j’ai envie d’entendre la prière du muezzin, je vais en Orient », ajoutait-il.

Quelques extraits de ses propos au vitriol : « les immigrants musulmans n’ont contribué en rien à la prospérité de l’Allemagne », «le taux élevé de fertilité de la communauté musulmane a réduit le QI général du pays », ou encore « les immigrants musulmans préfèrent toucher les allocations chômage plutôt que de travailler », et enfin « les Juifs partagent un gène spécifique » - propos qui a déclenché des accusations de racisme bien que, selonson auteur, il s’agissait de saluer l’apport de cette communauté à la prospérité allemande.

Ses propos ont évidemment déclenché une vague d'indignation en Allemagne. « Je trouve qu’avec ses idées, Sarrazin fait un grand honneur à Göring, Goebbels et Hitler. Il est dans la lignée spirituelle de ces messieurs », a déclaré le secrétaire général du Conseil central des Juifs, Stephan Kramer. Co-président des verts, le député d’origine turque Cem Özdemir a qualifié Sarrazin de « leader tribal du calibre de Ben Laden ». Des plaintes pour haine raciale ont étés déposées à l’encontre du polémiste. La chancelière Angela Merkel a qualifié ses propos d’« absurdes » et « complètement inacceptables ».

Pourtant, malgré cette réprobation politico-médiatique, Thilo Sarrazin, 65 ans, est gratifié d’un soutien non seulement de l’opinion, mais aussi d’une partie de la presse. Les 20 000 exemplaires du premier tirage de son livre se sont arrachés en quelques heures. De nombreux lecteurs du quotidien conservateur Frankfurter Allgemeine ont loué sa franchise. Dans un sondage organisé par le quotidien Bild, 51 % des personnes interrogées se disaient en grande partie d’accord avec ses propos, contre seulement 9 % qui les rejettent. Un sondage de la chaîne d’information continue N-TV a révélé que ses téléspectateurs approuvent Sarrazin à 96 %. Le quotidien Handelsblatt a estimé que les propos de Sarrazin sont certes trop forts, mais mettent en lumière une réalité : les ratés de l’intégration en Allemagne. L’hebdomadaire Stern a publié un article intitulé « Sarrazin a raison » ; quant à Der Spiegel, dans un numéro qui faisait sa une sur « Sarrazin, héros populaire », il expliquait que l’essayiste avait « crevé l’abcès ». Sur la chaîne ARD, celui-ci expliquait que 95 % des lecteurs qui lui écrivent le font pour lui dire qu’il ne va pas assez loin. Au cours de l'émission, 70% des téléspectateurs qui ont envoyé des messages exprimaient leur soutien à Sarrazin, a fait savoir l'animateur Reinhold Beckmann.

Le polémiste a même reçu un soutien musulman en la personne de la sociologue Necla Kelek, sociologue d’origine turque, que ses propos dénonçant les violences à l’encontre des femmes turques ont contrainte à vivre sous protection policière : « Thilo Sarrazin nous oblige, nous musulmans, à réfléchir à notre rôle en Allemagne. Il est ridicule de l’accuser de racisme, car l'islam est une religion et une culture, pas une race. Je partage ses inquiétudes quant au futur de l’Allemagne », a-t-elle affirmé, qualifiant encore Sarrazin de « citoyen responsable qui énonce des vérités amères »…

Thilo Sarrazin sera-t-il exclu du SPD ? Compte tenu de la réceptivité de l’opinion à ses thèses, cette issue semble problématique. Un sondage du journal Bild auprès de ses lecteurs conclut que 90% des personnes consultées estiment qu'il ne doit pas être exclu du parti social-démocrate. « Le risque […] est de faire du provocateur Sarrazin un martyr », estime un élu du SPD, tandis que Sigmar Gabriel, président du parti, reconnaît avoir « reçu de sa base énormément de courrier protestant contre l’exclusion prévue » du trublion. Alors que beaucoup l’y poussaient, et que des sondages commençaient à mesurer son audience, estimée à près de 16 %, Thilo Sarrazin a exclu de fonder son propre parti, qui aurait pu occuper le créneau populiste, à ce jour déserté en Allemagne. Il entend demeurer au SPD malgré la condamnation de ses propos par celui-ci : « Un catholique convaincu ne quitte pas l'Eglise catholique parce que le pape actuel ne lui plait pas. »

Quoi qu’il en soit, la polémique a déjà obligé la classe politique à se pencher sur la question de l’immigration qu’elle avait jusqu’alors prudemment esquivée, se réfugiant derrière la façade rassurante d'une société multiculturelle symbolisée par son équipe de football. Mais il y a deux ans, s'adressant à la communauté turque de Cologne, le premier ministre turc Erdogan avait choqué en mettant en garde ses compatriotes contre l'assimilation, qu'il avait assimilée à un "crime contre l'humanité".  Dans la foulée de la polémique ouverte par Thilo Sarrazin, Angela Merkel a revendiqué de pouvoir « parler ouvertement » des problèmes posés par l’immigration « sans être pour autant soupçonnée de xénophobie ». Quant au ministre bavarois de la santé Markus Söder (CSU), il a estimé que « c’est aux immigrés de s’adapter », pas l’inverse : « Les crucifix ont leur place dans les salles de classe bavaroises, pas les foulards », a-t-il proclamé. 

 

Philippine de Maigret et Laurent Dandrieu

Publicité
8 juin 2011

Béatrice Bourges : « L’homoparentalité risque de priver l’enfant de repères »

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/société/béatrice-bourges-«-l’homoparentalité-risque-de-priver-l’enfant-de-repères-»201007?sms_ss=facebook

Adoption homosexuelle. Après la décision controversée de la Cour de cassation.

Jeudi 8 juillet 2010, la Cour de cassation a cassé un arrêt de 2008 de la cour d’appel de Paris, qui avait refusé de valider une décision de justice américaine reconnaissant un lien de filiation entre un enfant et la compagne de sa mère biologique, relançant ainsi le débat sur l’homoparentalité. Quand Christine Boutin (PCD) s’insurge, estimant que « les juges de la Cour de cassation outrepassent leurs fonctions qui devraient être de défendre le droit national et non de favoriser son détournement », Maitre Caroline Mécary, l’avocate de Mme B. – la compagne de la mère biologique de l’enfant –, déclare que c’est « un pas considérable fait vers l’égalité de traitement des enfants élevés par deux hommes ou deux femmes ». Pourtant Béatrice Bourges, fondatrice de l’Association de la Protection de l’Enfance et auteur deL’homoparentalité en question (Editions du Rocher), souligne qu’il ne s’agit pas d’une victoire pour la communauté homosexuelle, ni d’une avancée vers l’homoparentalité.

Pourquoi avez-vous créée l’Association de la Protection de l’Enfance ?
 J’ai créé cette association au moment de la campagne pour l’élection présidentielle de 2007 parce que j’ai senti que les sujets touchants à l’adoption des enfants par des couples homosexuels et au mariage homosexuel allaient devenir très importants. Nicolas Sarkozy avait promis le statut du beau-parent et le contrat d’union civile : deux étapes qui allaient nous mener au mariage homosexuel et à l’adoption d’enfants par des homosexuels. Je me suis dit qu’il fallait prendre les choses en amont de façon à créer un vrai rapport de force, très pacifique mais très certain, pour lutter à la fois contre l’adoption et le mariage homosexuel.

 

Vous dites que dans ce débat, on oublie trop l’intérêt de l’enfant. Quels sont donc les besoins d’un enfant ? Un enfant a, certes, besoin d’amour. On va vous opposer que l’amour suffit, mais en fait, l’amour ne suffit pas ! Parce que la parenté crée un lien de filiation. Le fait d’être parent ce n’est pas simplement le fait d’éduquer un enfant. Si c’était seulement le cas, on pourrait considérer que certains éducateurs sont meilleurs que certains parents. En revanche, être parent créée un lien de filiation et permet à l’enfant de se situer dans une lignée, et cela est capital. D’autre part, le fait d’avoir des parents de sexes différents permet à l’enfant de forger son identité sexuelle.
Le risque pour un enfant d’être adopté par un couple homosexuel est tout simplement qu’il perde ses repères. Un enfant doit se situer dans une généalogie claire. Il doit bien sûr être éduqué - et, malgré tout, qui mieux que le parent éduque son enfant ? On vous dira toujours qu’il y a des cas où le père viole son fils ou sa fille, mais il s’agit de cas complètement à la marge. La grande majorité des parents éduquent bien leurs enfants. Donc être à la fois éducateur et parent, c’est ce qu’il faut prendre en compte.

Un des arguments des défenseurs de l’homoparentalité est d’avancer qu’un enfant sera mieux avec un couple homosexuel plutôt que de rester dans un orphelinat… 
Ce que je reproche au lobby gay c’est qu’en raison de leur idéologie, ils posent des questions fermées qui vous obligent à répondre d’une certaine façon. Evidemment si on me pose la question « l’adoption par un couple homosexuel ou l’orphelinat ?» et qu’on ne me propose aucune alternative, je vais réfléchir. Qu’est-ce qu’il y a de pire que l’orphelinat ? Sauf que la question ne se pose pas comme cela. C’est ce qu’on appelle une question biaisée, fallacieuse. Avec une vraie question – vaut-il mieux l’orphelinat ou l’adoption ? – le problème ne se pose même pas : on a 30 000 couples hétérosexuels qui ont un agrément pour adopter un enfant. Et 5000 enfants qui sont en attente d’adoption…

L’exequatur en France de la décision de justice américaine quant à la reconnaissance d’adoption par la compagne d’une lesbienne est-elle dangereuse ? La façon de procéder du lobby gay est toujours d’avancer davantage pour que les mentalités soient forgées et ainsi qu’on ne se batte plus…puisque la cour de cassation a validé une décision de justice américaine concernant l’adoption d’un enfant par deux femmes. Bien sûr que c’est dangereux mais ce n’est qu’un pas, ce n’est pas fait pour autant ! Cet exequatur ne donne aucun droit à des couples homosexuels d’adopter un enfant. Aucun !

Y arrivera-t-on un jour ? Je ne pense pas, je ne suis pas sûre. Je crois que finalement il y a toujours une espèce de balancier. Je suis écologique dans l’âme, je pense que la nature va reprendre ses droits. Le bons sens va reprendre ses droits.

Propos recueillis par Philippine de Maigret

 

8 juin 2011

Dieu a-t-il un visage ?

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/culture/actualités/dieu-t-il-un-visage20100706.html?sms_ss=facebook

Dieu a-t-il un visage?

"Le Visage de Dieu" : tel est le titre du nouveau livre à succès d'Igor et Grichka Bogdanov. Les célèbres frères s'y interrogent sur l'origine de l'univers, et tentent de s'approcher, autant que faire se peut, du mystère de la création.

Dès que l’on parle de l’origine du monde, la question de Dieu n’est jamais très loin. Le dernier livre d’Igor et Grichka Bogdanov, Le Visage de Dieu(Grasset), pose une question qui ne laisse personne indifférent : qui est à l’origine de l’univers ? Le 23 avril 1992, quand George Smoot (Prix Nobel 2006) réussit, grâce au satellite COBE, à présenter une image du ciel montrant la lumière la plus ancienne jamais émise par l'Univers, il dira qu'il a crut voir "le visage de Dieu"… La science peut-elle alors se confondre avec la plus haute spiritualité ?
Les frères Bogdanov reviennent sur la fabuleuse quête de l’origine de l’univers et s’approchent ainsi du mystère suprême, l’instant même de la Création. Pendant très longtemps, jusqu’au début du XXe siècle, les scientifiques étaient persuadés que l’univers n’avait pas d’origine. Ils pensaient, sur le modèle de ce qu’avaient affirmé les Grecs puis les astronomes au Moyen Âge, que l’univers était fixe. C’était le temps de Newton, de la mécanique classique, qui prédisait pour l'univers un destin qui n'avait ni commencement ni fin. L'univers ne bougeait ni dans l'espace ni dans le temps.

Vient ensuite Einstein, avec la révolution relativiste : entre 1905 (relativité restreinte) et 1916 (relativité générale), ce paysage est bouleversé. La relativité générale, c'est l'élaboration d'un système théorique d'interprétation de l'univers. C'est une nouvelle vision globale du cosmos. Einstein la traduit en créant un jeu d'équation. Mais il s'aperçoit que s’il obéit aux équations, elles le conduisent nécessairement à un univers qui n'est pas fixe et qui a une origine. Or, ce n'est pas ce qu'il pense. En plus, à l'époque, « personne ne pouvait imaginer qu’il y avait d’autres galaxies – d’autres voies lactées –, bien plus loin que ces nébuleuses que l’on apercevait la nuit au fond des télescopes. On en déduit que l'univers est statique », précisent les frères Bogdanov. Einstein y croit. Sauf que ses équations traduisent autre chose. Qu'à cela ne tienne, il va corriger ses équations et va introduire "à la main" un théorème qu'il va appeler la "constante cosmologique". Le seul but est de bloquer l'univers afin qu'il soit statique.

A des milliers de kilomètres, à Saint Petersburg, Alexander Friedmann, météorologue russe, résout les équations d'Einstein et il s'aperçoit qu'elles sont faussées par la "constante cosmologique". Il se rend compte que la véritable solution implique que l'univers est dynamique. Il l'écrit à Einstein en 1922. Furieux, ce dernier refuse les conclusions de Friedmann.

S'en suit un jeu de va-et-vient jusqu'à ce que Einstein admette son erreur, la plus grande de sa vie, dira-t-il plus tard. Mais il ne croit toujours pas à l'expansion de l'univers. Il reconnaît seulement que ses calculs sont corrects. Puis, en 1927, il rencontre l'abbé Lemaître, chanoine à l'université de Louvain en Belgique, mais également astrophysicien et mathématicien, qui lui démontre – sans connaître les solutions de Friedmann – que l'univers ne peut pas être statique. Einstein lui répond : « Vos calculs sont corrects mais vos conclusions sont épouvantables ». Epouvanté, Einstein l'est, car, à l'époque, on ne pouvait pas observer le mouvement de l'univers.

Mais deux ans plus tard, en 1929, un savant américain, Edwin Hubble, observe, lui, l'expansion de l'univers et celle des galaxies. Einstein va lui-même le constater dans la lunette du Mont Wilson. A partir de là, l'expansion de l'univers est une réalité observée et on en conclut que l'univers a vraisemblablement une origine. En 1931, on évaluait l'âge de l'univers à 20-25 milliards d'années. Puis, au fur et à mesure de l'affinement de l'observation, on estime maintenant que l'univers est âgé de 13,7 milliards d'années.

Si le Big Bang avait bien eu lieu, l'explosion qu'il suscita aurait dû laisser une trace qu'on entendrait encore. Et c'est en 1964 que Allan Penzias et Robert Wilson entendent, grâce à une nouvelle antenne sur laquelle ils travaillaient, un bruit parasite – il s'agit de l'écho du rayonnement fossile. Pour leurs recherches, les deux compères recevront le Prix Nobel de physique en 1978. Enfin en 1992, George Smoot réussit à montrer l’image de l’univers tel qu’il émergeait des ténèbres cosmiques tout juste 380 000 ans après le Big Bang.

Cependant, pourquoi Dieu ne serait-il pas à l’origine de la Création ? Si l’on peut expliquer le Big Bang, et même ce qui s’est passé avant cette fameuse "explosion" – les frères Bogdanov parlent de "l’information", quelque chose d'immatériel, c’est-à-dire de l’ADN cosmique – on peut également se poser la question du pourquoi. Dans quel but la Terre a-t-elle été créée ? Certains parlent de hasard. Mais d’autres, comme Einstein, croient à un Esprit supérieur. En 1936, un enfant demande au grand Albert s’il croit en Dieu. Quelques jours plus tard, le petit garçon reçoit une lettre en guise de réponse : « Tous ceux qui sont sérieusement impliqués dans la science finiront par comprendre un jour qu’un Esprit se manifeste dans les lois de l’Univers, un Esprit immensément supérieur à celui de l’Homme ». Il dira en 1955, quelques mois avant sa mort : « Je veux savoir comment Dieu a créé l'Univers. Je ne suis pas intéressé par tels ou tels phénomènes, tels ou tels éléments. Je veux connaître la pensée de Dieu. »

Alors peut-on dissocier la religion de la science ? Igor et Grichka Bogdanov exposent, pour Valeurs Actuelles, leur vision de Dieu et du Big Bang.

Les sciences et la religion sont-elles ennemies ? Il ne faut pas être tenté de voir un rapport entre les descriptions symboliques des Saintes Ecritures et les déductions liées aux calculs et aux observations scientifiques. Ce sont des choses extrêmement différentes. Cependant, on nous parle d'un même élément créateur. Certains penseurs ont fait le rapprochement. Prenons Pie XII qui fait une déclaration, dans les années 1950, disant que la science, au moment de la découverte du Big Bang, avait retrouvé de manière quasiment exacte les dires de la théologie depuis des millénaires. L'abbé Lemaître était chiffonné, heurté par cette déclaration du pape. Le chanoine suggère alors la prudence car il ne faut pas mélanger le domaine de la religion avec celui de la science. C’est d’ailleurs devenu, depuis, une règle : une séparation assez nette entre ces deux domaines. Elles ne partagent pas la même méthode d'approche. La religion est fondée sur la foi, la science sur les lois. Il y a une opposition entre croire et voir. Les hommes de Dieu vous le diront, il ne s'agit pas de prouver l'existence de Dieu, il s'agit de l'éprouver. C'est exactement ce que dit Saint Augustin au IV siècle : « Dieu ne s'argumente pas ».

Le hasard n’a donc pas de place dans la Création du monde ? Les scientifiques ont beaucoup de mal à accepter, à intégrer ce qu'ils appellent, avec une certaine distance sarcastique, l'hypothèse Dieu. La plupart sont réfractaires à cette idée. Ils sont même nombreux à contourner la causalité divine qui serait - qui pourrait - être à l'origine de l'univers. Ils le font soit en considérant que l'univers est né par hasard, soit en considérant qu'après tout, la loterie cosmique a fait apparaître de multiples univers parallèles, et que statistiquement, finalement, il y en a un qui est bon, et c'est le nôtre.
Dans les deux cas, ces visions sont non scientifiques et nous paraissent même absurdes. Comme Einstein, nous croyons à un Esprit supérieur à celui de l’Homme. Ce que nous disons heurte beaucoup la communauté scientifique qui aimerait bien en quelque sorte prouver la non-existence de Dieu. Nous pensons que leur tentative pour éliminer l'hypothèse Dieu les pousse à avoir un comportement non scientifique. Car la science c'est la confrontation d'une prédiction à une observation. Les univers multiples comme explication du  hasard ne s'apparentent qu'à une spéculation métaphysique.

Si l’on conçoit depuis un demi-siècle que le monde a une origine, a-t-il aussi une fin ? Il est clair qu'il y aura une fin de l'univers. Aujourd’hui, nous sommes presque persuadés que l’univers est accéléré dans son expansion par un champ très mystérieux, que personne ne peut décrire dans son détail. On l’appelle l'énergie noire. Ce que nous pouvons en conclure, c’est que l'univers va s'évaporer. A l'heure actuelle nous sommes dans une phase de matière. Dans un futur très lointain, dans des milliards et des milliards d'années, ces particules de matières vont se désagréger. Deux questions se posent alors : une fois que toute la matière aura disparue, que se passera-t-il ? Est-ce que tout cela a un sens ? Une fois dépassé l’univers matériel, nous retrouverons à l’horizon ce que nous appelons « l’information ». Il s’agira donc de « l’information finale ».  Elle nous amène à nous dire que, oui, toute l’existence dans l’univers a un sens. Parce que nous sommes, face à cette information, amenés à constater qu’elle conserve le souvenir, la trace de toute l’évolution antérieure. C’est comme si la matière et l’énergie s’étaient transformées dans cette information. C’est un message d’espoir, car cela veut dire que rien n’est perdu et qu’il y aura un horizon de sens qui se dégagera. Il nous est inaccessible aujourd’hui, mais il émergera dans cette matrice finale de l’information. Pour ces deux raisons, l’évolution, à très long terme, de l’univers, est porteuse d’espoir ! 

Propos recueillis par Philippine de Maigret

Le Visage de Dieu, d'Igor et Grichka Bogdanov, Grasset, 282 pages, 20 €.

8 juin 2011

Vers une nouvelle nuit du 4 août?

Retrouvez mon article sur Valeurs Actuelles:

http://www.valeursactuelles.com/actualités/politique/vers-une-nouvelle-nuit-4-août20100621.html?sms_ss=facebook

 

Vers une nouvelle nuit du 4 août?

C’est la loi des séries qui frappe le gouvernement. Après l’affaire Christine Boutin et sa mission payée 9 500 euros nets par mois, c’est au tour de Christian Blanc de se faire “offrir” 12 000 euros de cigares par l’Etat. Sujet donc fumeux pour le secrétaire d’Etat au Développement de la région-capitale, révélé par le Canard enchaîné mercredi 16 juin.  Pendant ce temps-là, l’équipe de France de football est logée dans un hôtel cinq étoiles au Cap. N’en déplaise à Rama Yade, c’est la Fifa qui régale… En revanche, le déplacement en Afrique du Sud de la Secrétaire d’État chargée des sports a coûté à l’État la bagatelle de 47 000 euros, toujours selon le satirique hebdomadaire.

Alors l’histoire se répèterait-elle ? Va-t-on vers une nouvelle nuit du 4 août 1789, qui vit l’abolition solennelle des privilèges ? Une réforme des retraites en vue, sur fond de crise aidant, la chasse aux privilèges a commencé. Cumul des mandats, retraites des parlementaires, salaires des ministres, appartements de fonction, les Français s’interrogent sur le train de vie de l’État.

Mais plus que les dépenses de l’État, ce sont les privilèges qui sont remis en cause. Pourtant en France, on considère souvent les privilèges comme les avantages des autres, les siens étant des avantages acquis… Suppression des privilèges versus sauvegarde des avantages acquis : voilà le dilemme français. Est-il envisageable de remettre en cause la retraite des fonctionnaires, les primes de fatigue aux cheminots, ou encore les exonérations fiscales des journalistes par exemple, sans être taxé d’ultra-libéral ? Deux poids, deux mesures ? Le sociologue Michel Maffesoli aborde pour "Valeurs actuelles" le thème des privilèges et de la transparence.

Michel MaffesoliY a-t-il une intolérance de plus en plus grande en période de crise quant aux privilèges ? Tout d’abord la crise est un simple prétexte. Il ne s’agit pas uniquement d’une crise économique et financière, mais d’une crise de la société. Il y a une insatisfaction profonde : quand on n’a plus conscience de ce que l’on est, on n’a plus confiance en ce que l’on est non plus. Elle est là, la vraie crise. Les grandes valeurs de la modernité et du progrès ne sont plus les valeurs en jeu. Le battage médiatique sur les privilèges - appartements de fonction ou dernièrement des cigares - ne représente qu’une pression de l’intelligentsia. A droite comme à gauche, les hommes politiques sont encore ancrés dans les “temps modernes”. Pourtant la conscience collective, le peuple, est lui, prêt à passer à une société postmoderne. L’égalitarisme ne marche plus. Nous allons vers un autre type de société, avec plus de solidarité et de générosité. Nous étions dans un système pyramidal. Nous allons vers autre chose.

Allons-nous vers une nouvelle nuit du 4 août ? L’abolition des privilèges permet une remise à plat des valeurs de temps à autre. Les privilèges sont réservés à une élite, qu’elle soit intellectuelle, politique ou même sportive. Si l’on prend l’exemple de l’aristocratie au Moyen Age, celle-ci jouait un rôle de protection vis-à-vis des paysans et du peuple tout entier. Quand ce rôle n’a plus été rempli, leurs privilèges ont été abrogés, cette fameuse nuit du 4 août 1789. Il y a donc une circulation des élites. L’aristocratie a ainsi laissé la place à la bourgeoisie.
En polémologie, quand une guerre est perdue, on assiste à des combats d’arrière-garde, qui sont souvent les plus violents et les plus sanglants. Cette chasse aux privilèges à laquelle nous assistons aujourd’hui est un peu la dernière lutte avant de passer à un nouveau cycle, une nouvelle ère.

La transparence est-elle nécessaire ? Un homme sans ombres n’existe pas. Tout comme une société. La transparence n’est pas bonne pour une société. L’équilibre c’est le clair obscur.

Propos recueillis par Philippine de Maigret

Dernier ouvrage paru de Michel Maffesoli : L’Ombre de Dionysos, CNRS éditions, 2010.

8 juin 2011

Gérard Fesch: l'enfance guillotinée

70785654001-Gerard-Fesch--l-enfance-guillotinee

En 1995, Gérard découvre en lisant l'Express que son père est sans nul doute Jacques Fesch. Il nous raconte son enfance meurtrie, ses déceptions, ses combats. Comment être parent quand on n'en n'a pas eu soi même? Interview de Philippine de Maigret.

http://www.omegatv.tv/video/70785654001/societe/societe/Gerard-Fesch--l-enfance-guillotinee


8 juin 2011

Gilles de Robien: Bayrou a cassé le centre!

60527782001-politique--la-securite-routiere--par-Gilles-de-Robien

Gilles de Robien estime que le centre s’est fourvoyé dans son rapprochement avec les socialistes. Cette prise de parti laisse sur le bas côté des milliers de militants en quête d’une nouvelle famille politique. Propos recueillis par Philippine de Maigret.

http://www.omegatv.tv/video/60563137001/societe/societe/Gilles-de-Robien--Bayrou-a-casse-le-centre

Parcours politique de Gilles de Robien

Gilles de Robien, né le 10 avril 1941 à Cocquerel (Somme), est un homme politique français.
Comte lui-même, il est le fils du comte Jean de Robien et d'Éliane Le Mesre de Pas. La famille de Robien est d'origine bretonne et de noblesse d'extraction chevaleresque depuis 1389.
Il suit sa scolarité à l'école de la Providence d'Amiens puis au collège Saint-Jean-de-Béthune à Versailles . Après des études de droit, il exerce à compter de 1965 la profession d'agent général d'assurances à Amiens.

Fonctions électives

•    Député de la 2e circonscription de la Somme depuis 1986
•    Membre de la commission des Finances
•    Membre de la Commission d'enquête sur les causes, les conséquences et la prévention des inondations à l'Assemblée nationale
•    Vice-président de l'Assemblée nationale de 1993 à 1998
•    Maire d'Amiens (Somme) depuis 1989 puis adjoint au maire depuis 2002, date à laquelle il entre dans le gouvernement. Et à nouveau depuis le 29 mars 2007.

•    Conseiller régional de Picardie en 1992
•    Président de la communauté d'agglomération Amiens Métropole depuis 1994
•    Chef de la délégation de la 33e session de la Conférence générale de l'UNESCO depuis octobre 2005
•    Il est également l'auteur de la loi du 11 juin 1996 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail, dite « loi Robien ».

Fonctions politiques

En 1990, Gilles de Robien devient membre du Bureau exécutif et du Comité directeur du parti républicain. Il siège parallèlement au Conseil National et au bureau politique de l'UDF, à partir de 1991. Depuis le 29 novembre 1998, il est membre du bureau politique et vice-président de l'UDF. Il occupe les fonctions de président du groupe UDF à l'Assemblée nationale de 1995 à 1997.

De mai 2002 à mai 2005, il assure la fonction de Ministre de l'Équipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer des gouvernements Raffarin 1, 2 et 3. À ce titre il met en place les radars automatiques en France. Depuis, la France compte 3 000 morts de moins par an sur les routes.

En 2004, il est la tête de liste de l'union UMP-UDF aux élections régionales en Picardie. Comme beaucoup d'autres députés sortants de la majorité dans la plupart des régions, il échoue face à la gauche.

Le 3 juin 2005, Gilles de Robien est nommé ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche du gouvernement de Villepin. Sa gestion des suites de l'agression d'Etampes (professeur poignardée par un lycéen en pleine classe) est fortement contestée, tant sur la mise en cause de « la société dans son ensemble » pour des faits qui relèvent de la responsabilité individuelle, que sur la volonté d'introduire des policiers dans les établissements scolaires. Le 29 décembre 2005, la presse révèle que les appels au secours de Karen Montet-Toutain n'avaient pas été suffisamment pris en considération par l'administration de l'Éducation nationale.

Gilles de Robien est suspendu de ses responsabilités dans les instances exécutives de l'UDF le 14 juin 2005, y compris de la vice-présidence, en raison de ses fonctions au Gouvernement qui lui valent souvent d'être critiqué au sein même de son parti.

Seul centriste du gouvernement, il se trouve dans une position inconfortable, où il doit s'efforcer d'être fidèle à la fois à Jacques Chirac, qu'il connaît de longue date, et du parti auquel il appartient depuis 30 ans. Il a notamment été proche de François Bayrou, dont il a dirigé la campagne présidentielle en 2002, mais marque aujourd'hui son éloignement devant son positionnement d'« électron libre », ce qui lui vaut les foudres de bon nombre des personnalités du parti centriste (Hervé Morin, Maurice Leroy, Marielle de Sarnez...). Malgré sa désapprobation de la stratégie du président de l'UDF - stratégie pourtant confirmée à 97 % par les militants votants au Congrès de Lyon de 2006, il affirme solennellement devant le Conseil National de l'UDF du 10 juin 2006 qu'il soutiendra la campagne présidentielle de François Bayrou en 2007, « seul candidat UDF légitime » à ses yeux. Le 31 mars 2007, il déclare cependant son ralliement à Nicolas Sarkozy dans une interview à paraître au Journal du Dimanche.

Gilles de Robien qualifie les meneurs des manifestations étudiantes de mars 2006 contre le CPE d'« agitateurs », reprenant à son compte la terminologie de François Missoffe ou d'Alice Saunier-Seité, ministre des Universités du Gouvernement de Raymond Barre. Parmi les décisions de Gilles de Robien en tant que ministre de l'Éducation nationale, on note l'interdiction de la méthode globale d'apprentissage de la lecture, la revalorisation de l'apprentissage ou encore l'assouplissement de la carte géographique scolaire.

Publicité
1 2 3 4 > >>
L'actualité de Philippine
  • Suivre l'actualité c'est le quotidien d'un journaliste. Cela touche à différents domaines: la politique, l'économie, l'environnement, les sujets de société, le monde de l'entreprise, celui de la famille, la santé, le sport, les sorties...
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
L'actualité de Philippine
Newsletter
Publicité